Je suis Jocelyne, j’ai toujours vécu limite dans la faim. Mes parents avaient à peine de quoi nous nourrir, surtout avec quatre enfants, une femme au foyer et un salaire d’ouvrier. Alors petite, je me suis toujours dit que je ne connaîtrais pas cette vie, je ferai tout pour avoir une vie meilleure. Aussi loin que je m’en souvienne, on ne mangeait pas à notre faim, et certaines fois nos parents se privaient de nourriture pour que nous puissions manger à notre faim. Mes parents se battaient, mais n’y arrivaient pas, cependant malgré les difficultés, on voyait combien de fois, ils tenaient l’un à l’autre. En 2005, suite à une courte maladie, mon père nous quitta avec le sentiment d’avoir échoué. Livré à nous- même, j’étais dans l’obligation de soutenir ma mère, j’ai donc arrêté les études en classe de quatrième pour exercer comme femme de ménage chez des particuliers. J’ai commencé par travailler en zone 4 chez une famille libanaise, l’argent que je gagnais était à peine suffisant pour nous nourrir et permettre à mes frères de continuer l’école.

Dans le quartier où je travaillais, j’ai rencontré celui qui allait devenir mon compagnon : henry, il était chef maçon et gagnait sa vie au gré des contrats qu’il trouvait par-ci par-là. Il était très attentionné avec moi et j’ai très vite succombé à son charme. Chaque soir, à ma descente du boulot, il me raccompagnait chez moi et les matins, avant de commencer ma journée, on partageait le petit-déjeuner. Chaque jour, je l’aimais encore plus. Il avait pris en main, certaines dépenses de ma maison comme le loyer et les factures. Il ne gagnait pas assez, mais cela ne l’empêchait de supporter mes charges.

Deux ans après notre rencontre, j’ai emménagé chez lui dans un studio dans un quartier populaire à Abidjan. Notre vie de couple ressemblait étrangement à celle de mes parents : sans argent, mais amoureux. Et pourtant, chaque soir je m’endormais en me disant que je ne connaîtrais que cette vie, remplir de stress ou manger et se soigner devient un lux. Je ferais donc des enfants qui plus tard connaîtraient le même sort que moi, une vie de fatalité. Henry était pour moi l’homme idéal, mais il était pauvre. Plus le temps passait, plus nos difficultés financières devenaient un sujet de discorde entre nous. Il pouvait rester un (01) mois sans contrat, alors on survivait grâce à mon salaire quand ces périodes arrivaient.

En début d’année 2017, j’ai eu un désaccord avec ma patronne et après tant d’années passées à son service, j’ai démissionné. J’ai réussi grâce à une amie, à avoir un autre boulot, celui de technicienne de surface dans une entreprise.

Ce travail dans cette entreprise m’a fait remettre en question une fois de plus ma vie. J’ai été encore plus complexé lorsque je voyais les femmes de cette structure toujours coquettes et exerçant un métier qui semble les passionner, et moi, je nettoyais après elles. Je rentrais toujours frustrée à la maison et j’en voulais à henry de ne pas me donner une meilleure vie, comme si c’était sa faute. Henry me pardonnait très vite mes crises de nerfs et nos disputes se réglaient aussitôt.

Le responsable commercial de cette entreprise était très jeune mais aussi très courtois. Il me traitait avec beaucoup de respect et était très attentionné à mon égard. Ma collègue aimait me taquiner à ce sujet, pour elle il avait des sentiments pour moi. Et ses pensées vont se confirmer.

Un soir à la descente du boulot, il m’attendait, il me proposa de m’accompagner chez moi, mais bien avant, nous sommes allés dans un restaurant très luxueux à biétry. J’avais les étoiles plein les yeux, sa manière de se comporter, de parler faisait penser aux acteurs dans les films. Il m a avoué qu’il avait des sentiments pour moi depuis mon arrivée dans l’entreprise. J’étais un peu abasourdie par cette révélation car plusieurs filles dans l’entreprise et non des moindres cherchaient à mettre le grappin sur lui, alors qu’il me préfère à elle m’étonnait.

Les jours qui suivirent, nos rencontres se faisaient pratiquement tous les soirs. Les endroits où je n’avais jamais espéré entrer m’étaient maintenant accessibles grâce à lui. Avec henry, les disputes devenaient de plus en plus régulières, car je trouvais toujours une excuse pour entrer tard ou pour m’absenter le week-end.

Je m’éloignais de lui, par parce que je ne l’aimais pas, mais j’aspirais à une autre vie avec moins de souffrance.

Ca va faire bientôt 8 mois que je joue à un double jeu et cette situation commence à m’épuiser moralement. Fred veut que l’on officialise notre relation et souhaite que j’arrête de travailler pour l’entreprise. Il est prêt à m’ouvrir un magasin de vêtements de luxe, je serai donc emmené à voyager pour me lancer dans cette activité.

Je sais qu’avec lui, je ne manquerais de rien et que je pourrais mettre ma famille à l’abri du besoin et goûter enfin à cette vie dont je rêvais depuis mon enfance. Si je l’aime, non, je l’apprécie énormément. Celui que j’aime par-dessus tout c’est henry, mais il ne peut pas me donner cette vie que je souhaite.

Je suis donc emmené à faire un choix : celui de l’amour ou de l’argent.