Je me nomme Clarisse. Je vis une histoire qui me hante jour et nuit.

Dans le mois de juillet 2017, je me suis rendu à Assinie avec mes copines pour un week-end. Nous étions au total quatre filles. Au début, quand j’en ai parlé à mon époux, il n’était pas d’accord avec cette sortie entre copines. Disons qu’il a accepté malgré lui car il était très absent à cause du boulot. Nous avons pris la route vendredi à 10 heures. J’étais tellement heureuse de cette sortie. Je culpabilisais d’avoir « abandonné » mes trois enfants, mais avec l’ambiance dans le véhicule, j’ai oublié un peu mes remords. Nous sommes arrivées aux environs de 12 heures à l’hôtel où nous avions réservé des chambres. Nous étions deux par chambre. On s’est désaltéré et on a commencé à visiter la ville. Il faut dire qu’on s’était faites un peu remarquées, avec notre apparence de jeunes lycéennes : jeans, t-shirts avec des tresses très longues.

 

Le samedi matin, pendant que les filles dormaient, je me suis rendue au restaurant de l’hôtel pour prendre mon petit déjeuner. La veille je n’avais pratiquement rien mangé, ce qui m’a donné une grande faim au réveil.

Dans le restaurant, pendant que je mangeais, un homme, la trentaine de type Européen, me regardait avec insistance. Les minutes qui ont suivi, il est venu s’asseoir à ma table. Je le regardais à peine mais lui n’arrêtait pas de me regarder. Il a voulu entamer la conversation avec moi, poliment je me suis excusée et je suis sortie de table.

En chambre, j’en ai parlé à mes copines qui se sont mises à me charrier en me disant que j’avais rencontré un admirateur. Mais, bizarrement, j’avais l’intuition que cet homme était dangereux. Le reste du temps, je suis restée en chambre, peut-être avais-je peur de rencontrer cet inconnu dans le couloir de l’hôtel. Le soir, dans notre programme, on devait aller jouer les folles en boite de nuit car cela faisait très longtemps qu’on n’y avait mis les pieds. Avant de nous y rendre, j’ai appelé mon mari pour m’assurer que tout allait bien à la maison mais aussi pour avoir son approbation. Il était d’accord, mais avait exigé que les filles et moi restions ensemble sans nous laisser approcher par des inconnus. En boite, l’ambiance était bon enfant, jusqu'à ce que l’inconnu du matin apparaisse. Je l’ai tout de suite signalé à mes copines qui m’ont dit de l’ignorer. L’ambiance aidant, on avait commencé à boire, plus que de nécessaire et à un moment donné je ne sentais plus mes jambes.

 

Alors, j’ai dit aux filles que j’allais rentrer en chambre. Isabelle, l’une d’entres s’est proposée de m’accompagner mais j’ai trouvé que ce n’était pas nécessaire du moment où la chambre était sur le même palier que la boite de nuit.

C’est lorsque j’ai pris le couloir qui menait à notre chambre que je me suis rendue compte que j’étais très saoule. Je ne tenais plus sur mes jambes. Il était pratiquement 3 heures du matin. J’ai fait une première chute dans le couloir qui m’a fait un peu rire, je pensais à mon fils ainé qui a 15 ans et à qui j’interdisais de consommer l’alcool.

A ma deuxième chute, j’ai senti une main me soutenir, j’ai remercié la personne et j’ai tout de suite remarqué que c’était l’inconnu du restaurant. Je lui ai demandé poliment de me laisser me débrouiller, que j’y arriverais toute seule surtout que j’étais à l’entrée de ma chambre.

Quand j’ai ouvert la porte, il m’a poussé à l’intérieur, je commençais à voir floue, ce dont je me souviens c’est de l’avoir supplié pour qu’il ne me fasse pas de mal. Tout ce qu’il m’a dit était que j’allais apprécier. Mon week-end de rêve à Assinie est devenu un cauchemar. Le pire, c’est que je n’avais pas la force de me défendre, l’alcool m’a rendue amorphe. Il est reparti 30 mn après m’avoir violée. Je n’arrivais même pas à pleurer, je m’en voulais terriblement, plusieurs choses me passaient par la tête.

 

Je suis restée sous la douche pendant une heure de temps. Je pensais à mon mari, c’étais l’unique homme qui avait partagé mon intimité jusqu'à ce soir. On s’était connu très jeune et c’était le seul. Les filles sont rentrées au petit matin vers 5 heures, j’avais tellement pleuré que je ne pouvais plus avoir de larmes. Je n’ai pas osé leur dire ce qui venait de m’arriver, je me sentais tellement sale et honteuse. Elles ont remarqué mes yeux enflés. Je leur ai dit que j’avais eu une dispute au téléphone avec mon mari et que je devais rentrer. Les copines m’ont encouragée à le faire. Mon mari était tout heureux de me voir, mais moi j’avais honte de lui dire ce qui m’était arrivé.

Cette nuit a gâché ma vie, et si comme cela ne suffisait pas, je viens d’apprendre par mon gynécologue que je suis enceinte. Les douleurs au bas ventre et le retard que j’avais m’ont emmené à consulter. Les enfants que j’attends, des jumeaux, sont de ce violeur. C’est sûr car dès mon retour d’Assinie, je n’avais pas pu coucher avec mon mari. J’ai mis cela sur le compte du travail et il a compris car je suis sur un projet qu’il connait très bien et c’est moi qui suis en charge de la réalisation. Je suis dans un énorme dilemme. Avorter serait peut-être la solution. Mais je me dis que ces petits êtres qui grandissent en moi ne sont nullement responsables de la bêtise commise par cet homme, et ma conviction religieuse m’empêche de le faire.

Je sais que je suis dans l’obligation de dire toute la vérité à mon mari et mes enfants. Je ne pourrai cacher la vérité longtemps et le pire dans tout ça c’est que tout le quartier se rendra compte que les enfants ne sont pas de mon mari, du moment où ils seront métisses.

Une chose est sûre, j’ai très peur de la réaction de mon mari, j’ai peur de le perdre. C’est l’être le plus formidable et je sais que je ne pourrai vivre sans lui.

 Mais comment va-t-il réagir ?

Va-t-il m’accorder le bénéfice du doute ?

J’ai peur de perdre cet homme extraordinaire, mon époux, j’ai tout simplement peur.